En tant que dirigeant d'une Société par Actions Simplifiée (SAS), vous disposez de plusieurs options pour vous rémunérer.
La flexibilité qu'offre cette forme juridique permet de choisir entre un salaire, des dividendes, ou une combinaison des deux. Ce choix stratégique aura des conséquences importantes sur votre protection sociale, votre fiscalité personnelle et celle de votre entreprise.
Cette décision mérite une réflexion approfondie, car elle influencera non seulement votre situation financière immédiate mais aussi votre couverture sociale et votre retraite future. Examinons ensemble, à travers cet article, les différentes options qui s'offrent à vous et leurs implications.
Le statut d'assimilé-salarié : avantages et coûts
En optant pour une rémunération sous forme de salaire, le président de la SAS obtient le statut d'assimilé-salarié.
Ce choix implique plusieurs conséquences importantes à considérer.
-
Une protection sociale complète
L'un des principaux avantages de ce statut est l'affiliation au régime général de la Sécurité sociale. L'assimilé-salarié bénéficie ainsi d'une protection sociale similaire à celle d'un cadre salarié, comprenant :
- Une couverture maladie complète ;
- Des droits à la retraite du régime général et complémentaire ;
- Des indemnités journalières en cas d'arrêt de travail.
Pour valider une année complète de cotisation retraite (soit quatre trimestres), le président devra percevoir un salaire minimal d'environ 600€ par mois sur l'année.
Cette protection représente un avantage considérable pour la sécurité à long terme du dirigeant.
-
Des charges sociales significatives
Cette protection sociale a cependant un coût non négligeable pour l'entreprise. Les cotisations sociales patronales à verser représentent environ 80% du salaire net, ce qui peut constituer une charge importante pour une structure en démarrage ou ayant une trésorerie limitée.
À titre d'exemple, pour verser un salaire net de 1000€ au dirigeant, l'entreprise devra débourser environ 1800€ au total.
-
Une imposition intégrée aux revenus du foyer
Le salaire du président est soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Il s'ajoute aux autres revenus du foyer fiscal et peut donc augmenter le taux d'imposition global du foyer. Cette progressivité de l'impôt peut s'avérer défavorable pour les foyers déjà fortement imposés.
-
Un avantage fiscal pour l'entreprise
Du point de vue de la société, la rémunération en salaire constitue une charge déductible du résultat imposable.
Cette caractéristique permet de réduire l'assiette soumise à l'impôt sur les sociétés (IS), offrant ainsi une optimisation fiscale à l'échelle de l'entreprise.
Les dividendes : une alternative à considérer
Le versement de dividendes représente une seconde option pour rémunérer le dirigeant associé d'une SAS. Cette modalité présente des caractéristiques spécifiques qu'il convient d'analyser.
-
Une absence de protection sociale
Contrairement au salaire, les dividendes ne génèrent aucune cotisation sociale et n'ouvrent donc pas de droits à la protection sociale.
Cette particularité peut sembler avantageuse à court terme en réduisant les charges immédiates, mais elle implique que le dirigeant devra se tourner vers des assurances privées pour compenser l'absence de couverture maladie et prévoir sa retraite par d'autres moyens.
-
Une fiscalité spécifique et potentiellement avantageuse
Depuis 2018, les dividendes sont soumis au Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU), également appelé "Flat Tax", à hauteur de 30% :
- 12,8% au titre de l'impôt sur le revenu ;
- 17,2% au titre des prélèvements sociaux.
Ce taux fixe peut être avantageux pour les contribuables dont le taux marginal d'imposition dépasse 30%, notamment ceux imposés dans les tranches à 41% ou 45%. Il reste toutefois possible d'opter pour l'imposition au barème progressif si celle-ci s'avère plus avantageuse.
-
Des conditions et contraintes spécifiques
Le versement de dividendes est soumis à plusieurs conditions :
- L'entreprise doit avoir réalisé un bénéfice distribuable ;
- Les pertes antérieures doivent être couvertes ;
- Une dotation à la réserve légale de 5% du bénéfice est obligatoire jusqu'à atteindre 10% du capital social.
Par ailleurs, les dividendes ne peuvent généralement être versés qu'une fois par an, après clôture de l'exercice comptable et approbation des comptes, ce qui limite la régularité des revenus comparativement au salaire mensuel.
-
Un impact fiscal différent pour l'entreprise
Contrairement au salaire, les dividendes ne sont pas déductibles du résultat fiscal de l'entreprise.
Ils sont prélevés sur le bénéfice après impôt sur les sociétés. Cette caractéristique représente un désavantage fiscal pour la société puisqu'elle ne permet pas de réduire l'assiette imposable.
Combiner salaire et dividendes : une stratégie d'optimisation
La solution idéale réside souvent dans un équilibre judicieux entre salaire et dividendes, particulièrement pour le dirigeant associé unique qui peut cumuler les deux formes de rémunération.
-
Déterminer un salaire "socle"
Une approche couramment recommandée consiste à se verser un salaire suffisant pour :
- Garantir une protection sociale adéquate ;
- Valider quatre trimestres de retraite par an ;
- Couvrir les besoins financiers réguliers et incompressibles.
Ce salaire "socle" peut ensuite être complété par des dividendes lorsque les résultats de l'entreprise le permettent, notamment pour récompenser une performance exceptionnelle ou financer des projets personnels spécifiques.
-
Adapter la stratégie à votre tranche marginale d'imposition
L'efficacité du mix salaire-dividendes dépend fortement de votre situation fiscale personnelle :
- Pour les foyers faiblement imposés (tranches à 0%, 11% ou 30%), privilégier le salaire peut être plus avantageux globalement, compte tenu de la protection sociale obtenue et du faible différentiel d'imposition.
- Pour les foyers fortement imposés (tranches à 41% ou 45%), les dividendes soumis au PFU à 30% deviennent fiscalement plus intéressants, à condition que le dirigeant dispose déjà d'une protection sociale suffisante par ailleurs.
-
Considérer le cycle de vie de l'entreprise
La stratégie optimale peut également varier selon le stade de développement de votre entreprise :
- En phase de démarrage : privilégier un salaire modéré pour limiter les charges tout en assurant une protection sociale minimale ;
- En phase de croissance : réinvestir les bénéfices plutôt que de distribuer des dividendes ;
- En phase de maturité : adopter une stratégie mixte équilibrée entre salaire et dividendes.
Les considérations à long terme
Au-delà des aspects fiscaux immédiats, votre stratégie de rémunération doit intégrer des considérations à plus long terme.
-
Préparer sa retraite
Le choix d'une rémunération exclusivement en dividendes peut sembler fiscalement avantageux à court terme, mais il peut avoir des conséquences significatives sur vos droits à la retraite.
Un salaire régulier, même modeste, permet d'accumuler des trimestres et des points pour votre future pension, ce que les dividendes ne permettent pas.
-
Se prémunir contre les aléas de la vie
La protection sociale offerte par le statut d'assimilé-salarié constitue un filet de sécurité important en cas de maladie ou d'accident. Sans cette couverture, le dirigeant rémunéré uniquement en dividendes devra souscrire des assurances privées potentiellement coûteuses pour obtenir une protection équivalente.
-
Anticiper les évolutions réglementaires
Les règles fiscales et sociales évoluent régulièrement. Une stratégie trop optimisée selon les règles actuelles pourrait s'avérer moins pertinente suite à une réforme fiscale ou sociale.
Il est donc prudent d'adopter une approche suffisamment flexible pour s'adapter aux changements législatifs.
Conclusion : une décision personnalisée nécessitant expertise et analyse
Le choix entre salaire et dividendes en SAS ne peut se résumer à une formule universelle. Cette décision stratégique doit être élaborée en fonction de nombreux paramètres individuels :
- Votre situation fiscale personnelle et familiale ;
- Vos besoins de protection sociale ;
- La santé financière de votre entreprise ;
- Vos objectifs patrimoniaux à long terme ;
- Votre rapport au risque et à la sécurité.
Pour les entrepreneurs débutants ou disposant de revenus modestes à moyens, le versement d'un salaire régulier reste généralement la solution la plus équilibrée, offrant une protection sociale complète tout en permettant une optimisation fiscale pour l'entreprise. Le versement de dividendes peut venir compléter cette base salariale selon les résultats de l'entreprise.
En revanche, pour les dirigeants disposant déjà d'une situation financière solide et se situant dans les tranches supérieures d'imposition, une stratégie privilégiant les dividendes peut s'avérer plus efficace fiscalement, tout en veillant à conserver un minimum de protection sociale.
Dans tous les cas, cette décision mérite d'être prise avec l'accompagnement d'un expert-comptable ou d'un conseiller fiscal, capable d'analyser précisément votre situation personnelle et celle de votre entreprise pour déterminer la stratégie optimale adaptée à votre profil spécifique.
L'équilibre parfait entre dividendes et salaire n'est pas un choix figé mais une stratégie évolutive, à réévaluer régulièrement selon les performances de votre entreprise et l'évolution de votre situation personnelle.